Les Championnats du monde se sont terminés pour les Bleus après une cinquième défaite face à l’Allemagne. Ils finissent quatorzièmes tout juste au-dessus des deux relégués à savoir, la Pologne et la Grande-Bretagne. Quel bilan peut-on tirer de cette campagne tchèque ? Quid du TQO et de l’élite l’année prochaine ? Eléments de réponse.

Alors que la Tchéquie vient d’être sacrée championne du monde, il est temps pour nous de faire un état des lieux de la campagne française à Ostrava. En premier lieu, le pire classement depuis 2012 à l’exception de 2019 et la descente en D1A.

Stéphane da Costa aux championnat du monde à Ostrava (République Tchèque). Crédit Photo : Xavier Lainé

 
Un jeu offensif qui pêche

L’analyse des statistiques révèle des problèmes persistants dans le jeu offensif. L’équipe n’a marqué que 13 buts en 7 matchs, soit une moyenne de 1,86 but par match. Ce chiffre est insuffisant pour espérer remporter des matches à ce niveau de compétition. Les Bleus ont inscrit moins de buts seulement en 2016, 2022 et 2023. Ils font jeu égal avec les éditions 2013, 2015 et 2018.

Le taux de tirs est de 7,98%, soit en 6e position sur les dix dernières éditions, loin des 11,3% de 2018, la dernière édition de Dave Henderson. Les attaquants français ont peiné à convertir leurs occasions, ce qui a lourdement pesé sur les résultats de l’équipe. Sans aucun doute, nos attaquants n’ont pas tous le niveau de l’Elite, cependant sur cette campagne, il manquait de nombreux joueurs à caractère offensif : Fabre, Dubé, Texier et Da Costa pour une bonne partie du Mondial. Cependant, la défense a été au niveau et notamment le désavantage numérique.

 
Efficacité en désavantage numérique

Parmi les aspects positifs, l’efficacité en désavantage numérique a été notable. Avec un taux de réussite de 86,21 %, l’équipe a su limiter les dégâts, lorsqu’elle évoluait en infériorité numérique. Cette performance démontre une bonne discipline et une organisation défensive solide dans ces situations critiques. Auvitu, Gallet, Thiry mais également Dair, Bruche sans oublier Bellemare ont fait un travail de qualité pour limiter les chances des adversaires. Il s’agit de la deuxième meilleure performance depuis 2012. Une vraie réussite de l’équipe, notamment du staff et Ivano Zavatta qui était en charge du « penalty kill » sur cette édition. Par ailleurs, les gardiens ont joué un rôle non négligeable dans cette solidité défensive.

 
Des gardiens solides, mais des résultats décevants

L’un des points forts de l’équipe cette année a été la performance des gardiens de but. Avec un pourcentage d’arrêts impressionnant de 89,21 %, ils ont su maintenir l’équipe dans le jeu, même face à une avalanche de tirs adverses. Cette performance est d’autant plus remarquable comparée aux années précédentes, plaçant les gardiens français parmi les meilleurs de la période récente. Cette moyenne est très hétérogène en fonction des gardiens. Il s’agit de la cinquième meilleure performance depuis 2012, la première sous l’ère Bozon. Trois d’entre eux se sont partagés la garde de la cage, avec des performances variées. Voici une analyse détaillée des prestations de Quentin Papillon, Julian Junca et Sebastian Ylönen, pour déterminer qui a été le meilleur cette saison.

Quentin Papillon : Le meilleur des trois

Quentin Papillon a été le gardien le plus performant de l’équipe cette saison. En 4 matchs joués, il a passé 163 minutes et 8 secondes sur la glace, ce qui représente 38,80 % du temps total de jeu. Il a encaissé 10 buts tout en réalisant 109 arrêts sur 119 tirs, soit un pourcentage d’arrêts impressionnant de 91,60 %. Sa moyenne de buts encaissés par match est de 3,68, la plus basse parmi les trois gardiens. Malgré l’absence de victoires, son efficacité et sa constance font de lui le gardien le plus fiable de la saison.

Julian Junca : Une performance solide mais inconstante

Julian Junca a joué 3 matchs, totalisant 100 minutes et 9 secondes, soit 23,82 % du temps de jeu. Il a encaissé 7 buts et réalisé 51 arrêts sur 58 tirs, ce qui donne un pourcentage d’arrêts de 87,93 %. Sa moyenne de buts encaissés par match est de 4,19. Bien que ses statistiques soient correctes, elles sont inférieures à celles de Papillon. Junca a montré qu’il pouvait être un bon rempart, mais son inconsistance relative a été un facteur limitant.

Sebastian Ylönen : Le moins bon de la saison

Sebastian Ylönen a partagé le temps de jeu de manière équilibrée avec Papillon, jouant 3 matchs pour un total de 157 minutes et 9 secondes, soit 37,38 % du temps de jeu. Il a encaissé 8 buts sur 63 tirs, avec 55 arrêts, ce qui lui donne le pourcentage d’arrêts le plus bas à 87,30 %. Sa moyenne de buts encaissés par match est de 3,05, légèrement meilleure que celle de Junca, mais il a fait face à moins de tirs. Il a néanmoins réussi à enregistrer une victoire, ce qui est un point positif dans sa performance globale.

Quentin Papillon ressort comme le meilleur gardien de l’équipe de France cette saison, grâce à son pourcentage d’arrêts élevé et sa constance dans les buts. Julian Junca a offert des performances solides mais légèrement en deçà, tandis que Sebastian Ylönen a montré des lacunes malgré une victoire enregistrée. Papillon, avec ses statistiques impressionnantes, est sans conteste le gagnant de cette analyse comparative. C’est probablement l’enseignement de cette campagne tchèque : Quentin Papillon est devenu le gardien numéro 1 de cette équipe de France. Il est fort probable que Sebastian Ylönen vive ses derniers moments en Bleu. Par ailleurs, le futur semble brillant avec l’éclosion d’Antoine Keller qui, s’il continue sur sa lancée, pourrait devenir rapidement incontournable devant les buts bleus. N’oublions pas non plus Martin Neckar qui a d’excellents résultats en Suisse.

Les joueurs qui se sont démarqués à Ostrava

Sans surprise, Stéphane Da Costa, a été un véritable dynamiteur en attaque cette saison. En seulement trois matches, il a accumulé 4 points grâce à 2 buts et 2 assistances. Sa précision au tir est impressionnante avec un pourcentage de réussite de 22,22 % sur 9 tirs. Da Costa s’est également montré décisif en avantage numérique, inscrivant deux buts dans cette situation. Avec un temps de glace de 60 minutes et 28 secondes, il a été l’un des piliers offensifs de l’équipe.

Le « jeune » joueur d’ECHL, Justin Addamo, a également brillé avec une efficacité redoutable. En cinq matches, il a marqué 2 buts et délivré 1 assistance, totalisant ainsi 3 points. Son pourcentage de tirs réussis est de 50 %, ce qui témoigne de sa précision et de sa capacité à convertir les opportunités en buts. Avec 10 minutes de pénalité, il a su combiner jeu physique et efficacité offensive, tout en enregistrant un différentiel de +1.

Enfin, toujours présent dans les Championnats du monde, Anthony Rech, a su allier performances offensive et défensive. En sept matches, il a marqué 1 but et délivré 3 assistances, cumulant ainsi 4 points. Son différentiel de +1 reflète son jeu équilibré. Rech a passé un temps considérable sur la glace, avec 105 minutes et 11 secondes, ce qui montre sa constance et son importance pour l’équipe.

Du côté de la défense, Yohann Auvitu s’est illustré par ses qualités de passeur cette saison. En sept matches, il a délivré 4 assistances, montrant ainsi sa vision du jeu et sa capacité à créer des opportunités pour ses coéquipiers. Bien que son différentiel de -6 indique des difficultés défensives, son apport offensif est indéniable. Avec près de 160 minutes de jeu, Auvitu a été un acteur clé sur la glace.

Toujours présent pendant les campagnes qui comptent, Florian Chakiachvili a montré sa solidité à la fois en défense et en attaque. En sept matches, il a marqué 1 but et délivré 2 assistances, totalisant 3 points. Son différentiel de -3 et ses 4 minutes de pénalité témoignent de son engagement physique. Avec un temps de glace de 123 minutes et 44 secondes, Chakiachvili a été un défenseur fiable et constant pour l’équipe.

Enfin, le jeune défenseur des Dragons de Rouen, Enzo Cantagallo a fait preuve de talent malgré son jeune âge. En sept matches, il a marqué 1 but et montré une certaine agressivité avec 6 minutes de pénalité. Avec un pourcentage de réussite de 16,67 % sur ses tirs et un temps de glace de 87 minutes et 3 secondes, Cantagallo a démontré qu’il est un espoir prometteur pour le futur de l’équipe.

Cette année, l’équipe de France de hockey sur glace a pu compter sur des performances remarquables de ses meilleurs attaquants et défenseurs. Stéphane Da Costa, Justin Addamo, et Anthony Rech ont brillé en attaque, tandis que Yohann Auvitu, Florian Chakiachvili, et Enzo Cantagallo ont solidifié la défense. Ces joueurs ont non seulement montré leur talent individuel mais ont également contribué de manière significative à la dynamique de l’équipe. A l’inverse, cette année les performances de Tim Bozon par exemple ont été moins flamboyante que l’année dernière par exemple. Il a probablement joué en étant diminué.

Thiry, Claireaux, Perret, Crinon face à Boldy et Tkachuk. France – Etats-Unis, Ostrava le 16 mai 2024. Crédit photo : Timothée Grandhomme / Plan de Match

Le coaching de Philippe Bozon

Beaucoup s’interrogent sur le coaching de Philippe Bozon et sur sa personnalité. Depuis son arrivée, il semblerait que la France n’ait pas progressé. Les statistiques parlent d’elles-mêmes : le « penalty kill » est l’un des meilleurs sur les dix dernières années. Pour le reste, c’est plus compliqué. Les problèmes évoqués dès 2019 ne semblent pas avoir été traités complètement, notamment la communication avec le vestiaire. Les choix de Bozon ne sont parfois pas toujours acceptés par les joueurs, notamment tactiquement.

Et après ?

Ostrava 2024 a mis en lumière les points forts et les faiblesses de l’équipe de France de hockey sur glace. Pour retrouver le chemin de la victoire, il sera crucial de renforcer l’efficacité offensive et de maintenir la solidité défensive. L’entraîneur Philippe Bozon et son équipe devront analyser ces résultats pour ajuster les stratégies et préparer le TQO dès août 2024. Philippe Bozon espère pouvoir récupérer Dubé, Texier, Spinozzi pour apporter du talent à l’offensive des Bleus. Ces Championnats du monde ont permis de se tester avant le vrai grand évènement de cette année pour l’équipe et pour Philippe Bozon : le tournoi de qualification olympique qui aura lieu à Riga en août prochain. C’est l’enjeu majeur pour la FFHG. Si l’équipe de France ne se qualifie pas, alors Philippe Bozon pourrait être limogé. Qui pourrait le remplacer ? La question reste ouverte.

En tout état de cause, les Bleus retrouveront l’élite l’année prochaine probablement à Stockholm en Suède. Le « ranking » IIHF du hockey masculin après les championnats du monde à Ostrava et à Prague est le suivant :

1 Canada
2 Russie
3 Finlande
4 République Tchèque
5 Suisse
6 Etats-Unis
7 Suède
8 Allemagne
11 Slovaquie
12 Lettonie
13 Danemark
14 Norvège
15 Autriche
16 France
17 Kazakhstan
18 Hongrie
19 Slovénie

En prenant ce ranking, les groupes pour les prochains championnats du monde au Danemark et en Suède seraient les suivants : 

Groupe A (Stockholm) Groupe B (Herning)
Canada Finlande
République Tchèque Suisse
Suède Etats-Unis
Allemagne Slovaquie
Lettonie Danemark
Norvège Autriche
France Kazakhstan
Hongrie Slovénie

A noter que les organisateurs n’auraient droit qu’à un seul changement puisque dans ce tableau, les Etats-Unis ont déjà « switché » avec la Suède pour se retrouver à Stockholm. La France se retrouverait avec la Hongrie, la Norvège et la Lettonie, un groupe qui semble plus relevé que cette année. Autre élément à prendre en compte, la réintégration ou non de la Russie. Il est peu probable que la Russie réintègre les championnats du monde dès l’année prochaine, l’IIHF prendra une décision probablement d’ici la fin de l’année.