Tout juste arrivé sur les bords de la Maine, Jason O’Leary, le nouveau coach des Ducs d’Angers a répondu à nos questions. Sa philosophie, son parcours, sa vision du championnat de France. N’oublions pas, non plus sa vision sur les statistiques avancées. Il nous a répondu sans détour, entretien fleuve.
Plan de Match : Qu’est-ce qui t’a fait te lancer dans le coaching ? Quelle en est ta philosophie ?
En fait, à partir de mes 18-19 ans, j’ai eu l’impression que je pourrais plus jouer très longtemps et j’avais hâte d’être entraîneur. Pour expliquer, à 15 ans j’ai commencé à travailler avec les écoles de hockey, comme on appelle ça chez nous, ce sont des camps d’entraînement pour les jeunes joueurs, pour les défenseurs notamment, et je me suis dit que c’est peut-être quelque chose que je pourrais faire. Chez nous, il n’y a pas beaucoup d’entraîneurs qui sont professionnels en fait, c’est plutôt du bénévolat avec un autre job à côté.
Kevin, mon ancien coach m’a dit que je devrais jouer aussi longtemps que je pourrais. Du coup j’ai commencé à jouer à l’université, j’ai fait quatre ans là-bas, ça m’a permis de préparer deux diplômes, dont un en éducation, et m’a permis d’être enseignant.
Je me suis dit qu’il y avait des écoles ou on peut faire entraîneur et enseignant en même temps, alors j’ai commencé à être vraiment entraîneur après tout ça.
Au Nouveau Brunswick, quand t’es un jeune enseignant, t’es pas payé l’été alors j’ai cherché un job estival à 22-23 ans et j’ai trouvé une vraie école de hockey qui travaille l’été. Ce sont des joueurs qui viennent pour faire des camps de deux semaines en pension complète pour s’améliorer.
T’es sur la glace 3 fois par jour, t’as le « off-ice », la nourriture, le logement, tout est compris. J’ai commencé par y rester 8 semaines l’été, et on m’a proposé d’y rester toute l’année. La première année ça ne l’a pas fait, mais la deuxième, je me suis dit que j’allais essayer d’être entraîneur full-time. Je me levais le matin, je prenais un gros van de 12 places et j’allais ramasser tous les joueurs pour les emmener à l’école. Ensuite, ils faisaient leurs hors-glace, puis je les récupérais pour les entraînements sur la glace…
J’ai pu voyager partout en Amérique du nord, c’était un job intéressant mais ce n’était pas vraiment comme entraîner des pros.
Après ça, ils ont ouvert une école comme ça en Autriche, près de Vienne. Ils m’ont proposé d’y aller. J’y suis allé avec ma femme et mes deux enfants. C’était une chance pour moi.
Au Nouveau-Brunswick, peu de gens voyagent, ce n’est pas très multiculturel, c’est beaucoup de fermiers, c’est rare que quelqu’un parte de là-bas pour déménager ailleurs.
Pour mes enfants c’était une nouvelle expérience. A l’époque avec ma femme on a pensé que ça pouvait être une bonne expérience pour tous. Découvrir une autre langue, une autre culture, c’était la chance de découvrir autre chose. C’était pas mal payé, on pouvait y vivre, voyager tout l’été… J’ai fait ça pendant 4 ans, j’étais le premier entraîneur. En parallèle, je continuais d’être enseignant.
C’était vraiment intéressant, fun, et c’est là que j’ai rencontré un joueur, qui a joué pour moi pendant 4 ans, dont le frère était directeur sportif en Suisse.
On s’est contacté, et il m’a demandé si ça m’intéresserait d’être entraîneur assistant pour son équipe. J’ai eu d’autres offres, mais pour moi c’était important de regarder avec qui je travaillerais si j’acceptais.
C’était un bon gars, et il m’a dit qu’il avait besoin d’un assistant pour l’année d’après en pro., j’ai déménagé en Suisse. Ça a été mes premiers pas dans le niveau pro, c’était en deuxième division suisse.
Ensuite j’ai pris la position d’entraîneur chef, et c’est comme ça que c’est arrivé. En gros c’était un accident, mais je pense qu’entraîner et enseigner c’est presque pareil, et tout m’y a conduit. T’es là pour aider, guider, mais t’es pas là pour diriger et dicter une conduite. Je suis très émotif, je ressens beaucoup les émotions. Pour moi l’esprit d’équipe est super important, je pense que c’est la meilleure façon de travailler. C’est ce qui m’a donné envie d’être entraîneur, même si maintenant c’est difficile de tout axer là-dessus car les joueurs, partout dans le monde, jeunes ou vieux, ils veulent avancer pour eux même. Ils veulent gagner, c’est sûr, mais plus vraiment pour l’équipe comme avant, ils sont devenus plus individualistes et pour moi c’est un peu décevant. Le hockey c’est un jeu d’équipe fantastique, et on a perdu cette mentalité solidaire, « globaliste ».
Quand j’étais enfant, au Canada, j’ai grandi dans une ferme, et tout était à propos de travailler dur, pour tout le monde. Je n’avais pas de petit boulot, je n’en ai jamais eu. Je faisais le ménage des écuries pendant qu’un autre s’occupait des chevaux, le lendemain l’inverse, et il fallait le faire car sinon qui le ferait ? C’était pareil au hockey, et c’est ce que j’aimais, tout était naturel.
Aujourd’hui j’aime être dans une patinoire, sur la glace, travailler avec les gars, c’est quelque chose qui est naturel pour moi.
Plan de Match : En 2017 sur ta 2e année en suisse en tant qu’entraîneur chef, tu as remporté le championnat. Qu’est ce qui t’a permis d’en arriver là ?
Ce n’était pas juste moi, ce n’était pas juste l’équipe, c’était le club dans sa globalité. Tout le monde travaillait dans le même but, avec les bonnes personnes pour y arriver. L’entente, la cohésion, étaient incroyable. On a eu la chance de monter en ligue A, mais les joueurs n’ont pas voulu, pour pas plusieurs raisons. Il faut préciser que si t’as un joueur qui est en contrat de 3 ans dans la ligue B, si tu passes en ligue A, il perd son contrat, même s’il n’est pas terminé.
On avait un effectif un peu plus vieux, avec de l’expérience, et ils se sont dit qu’ils pouvaient gagner autant en ligue B qu’en A. Si l’équipe montait, même s’ils gardaient tous leur place, on aurait eu du mal à atteindre le niveau de la ligue sans renforcer l’effectif, ils perdraient du temps de glace.
Et puis aller travailler tous les matins sans le sourire, sans le fun, avec trop de pression parce que tu perds beaucoup plus ou que tu joues beaucoup moins, ça ne les tentait pas.
Plan de Match : Peux-tu nous raconter ton parcours en Suisse, en NLB et en NLA ?
En NLA le niveau est plus égal d’une équipe à l’autre, il y a beaucoup de joueurs, et beaucoup d’étrangers, et ça donne un championnat plus serré.
J’ai débuté à Langenthal. Pour ma première année on avait une très bonne équipe, mais ça s’est renversé lors de la deuxième saison car l’entraîneur communiquait moins avec son équipe. On m’a proposé de devenir entraîneur chef en décembre. Je n’ai pas changé grand-chose, mais j’ai appuyé sur l’esprit d’équipe et la communication, le soutien aux joueurs, et on a gagné le premier round de play-offs.
Ensuite on m’a proposé de reprendre l’équipe, et on a eu une super saison, mais on a perdu dans la première ronde des playoffs. Et là je me suis dit que l’année d’après ça allait être notre moment. Je suis un gars qui travaille vraiment pour l’équipe. C’était beaucoup de choses en fait, l’esprit de l’équipe, la santé, l’envie de jouer, et tout le monde autour de l’équipe aussi, le bureau, le staff, les bénévoles, ça faisait vraiment de la magie.
Et l’histoire a fait que ça s’est très bien passé. Mais c’est important de dire qu’il faut beaucoup de choses pour gagner. Plein de gens disent que c’est l’argent qui amène à la victoire, mais ce n’est pas vrai. Ce n’est pas juste l’argent, ce n’est pas juste les meilleurs joueurs, c’est beaucoup de choses qui ont un impact sur la victoire. Si tu gagnes c’est aussi de la chance, la santé, l’entourage des joueurs. On pense que tout se passe sur la glace, mais il y a énormément de paramètres extérieurs qui ont une influence sur les joueurs.
Après, j’ai signé pour un an de plus à Langenthal, mais une semaine après j’ai reçu une offre pour rejoindre la NLA avec Genève-Servette comme entraîneur adjoint. Je ne suis pas vraiment vieux pour un entraîneur, même aujourd’hui. Moi j’ai tellement une mentalité d’enseignant que j’avais envie d’apprendre, de m’améliorer. J’ai discuté avec mon directeur et il m’a conseillé d’y aller, alors j’ai foncé.
J’ai pris beaucoup de fun, mais on a eu des problèmes en dehors de la glace, avec l’entraîneur notamment, et ils l’ont viré, ont vendu l’équipe, et ont coupé pas mal de contrats.
J’avais un contrat de trois ans, mais ils voulaient faire des économies et ils ont jugé ne pas avoir besoin d’un deuxième assistant, alors je suis parti à Zug. Là-bas, l’expérience était vraiment géniale, parce que travailler avec les bonnes personnes, qui ont le bon caractère, comme à Genève au début, ça renforce la cohésion.
On avait deux équipes en fait, une en A, une en B. Et avec l’équipe B, beaucoup de juniors, on a réussi à aller en play-offs avec des jeunes de 18-19 ans, c’était fou. Les personnes font la différence, et après ça j’ai eu la chance d’aller en Allemagne.
Plan de Match : Quelles sont selon toi les plus grosses différences entre les championnats Suisse, Allemand et Français ?
Ça va plus vite ici, mais il y a moins de structure de jeu par contre. En Suisse c’est pareil, ça va vite, mais moins. Les joueurs gardent plus longtemps le palet, ils contrôlent plus, et en Allemagne, c’est un jeu plus dur. Ça se bat, ça s’intimide. Avoir une équipe dure physiquement aide là-bas car ça rend les adversaires nerveux. L’attitude des fans et des arbitres jouent dans tout ça aussi, il faut le dire. Ici par exemple, les coups de bâton ça arrive beaucoup plus souvent qu’en Suisse, mais ça met beaucoup moins en échec qu’en Allemagne. Beaucoup de choses ont un impact sur le jeu, et ici la vitesse est assez élevée.
La différence est aussi entre les formations des jeunes. Chez moi quand j’étais enfant, j’apprenais de mon père, tout le monde joue au hockey, mais ici ce n’est pas vraiment dans la culture. La compréhension du sport vient peut-être de la télévision, de l’adaptation d’autres sports comme le foot par exemple, c’est du coup moins complet. Les différences ne sont pas énormes, mais il y a un gros manque de profondeur.
J’ai pu coacher Steph Da Costa, c’est un joueur incroyable, tout comme Damien Fleury, Cristobal Huet, Alexandre Texier… Il y a des joueurs français absolument fantastiques, mais il y en a peu, et ça illustre bien cette différence sur la formation.
Plan de Match : Quelle est ta vision des stats avancées ? Comptes-tu t’en servir ici, en France ? Sont-elles utilisées en Suisse et en Allemagne ?
En France c’est difficile à trouver, et c’est cher. Ça peut être considéré comme une différence aussi, car même si la qualité de vie ici est incroyable, les apparts aussi, la patinoire aussi, les salaires sont plus élevés en Suisse et en Allemagne. C’est plus difficile de garder les bons joueurs, il y a moins d’argent, et c’est pareil pour la vidéo, et les statistiques.
Les clubs font ce qu’ils peuvent avec ce qu’ils ont, mais pour moi les statistiques avancées ça peut améliorer les joueurs. C’est une étape nécessaire, mais c’est compliqué car on a que deux entraîneurs par équipe en France, et il faudrait une personne dédiée.
En plus de ça, les vidéos sont vraiment compliquées à suivre car je ne le savais pas mais en fait ce n’est pas tenu par une personne, des fois ça suit, des fois ça part de l’autre côté, et améliorer tout ça pourrait améliorer le jeu du pays dans sa globalité. (Playsight utilise des caméras automatiques NDLR).
Regarde le foot, ils ont commencé sans rien, maintenant ils ont des statistiques partout. Le hockey n’a pas les mêmes moyens.
En Suisse et en Allemagne ils commencent tout juste à utiliser les stats, mais ils n’en sont qu’au tout début. Même au Canada ou dans la NHL ça ne fait pas si longtemps que ça que c’est utilisé, et au début ce n’était pas pour tout le monde, notamment parce que les chiffres ça peut faire peur. Certains ne sont pas très à l’aise avec ça, et il faut s’en servir pour ce que c’est : un outil. C’est fait pour aider, mais il ne faut pas tout baser dessus.
Plan de Match : On a pu observer sur tout le début de saison un style de jeu en grande partie basé sur le « dump and chase », quel est ton style de jeu ?
« Dump and chase », c’est un style qui peut aider avec une équipe qui manque peut-être de talent, mais là ça ne fonctionne pas. Personnellement, je n’ai pas vraiment de style de jeu.
Je pense qu’il faut adapter un jeu à l’équipe qu’on a, et là on a une équipe plutôt forte, créative, rapide avec un bon potentiel offensif.
Je n’ai pas vraiment suivi ce qu’il se passait avant, mais le « dump and chase » c’est un jeu qui demande beaucoup d’énergie, qui travaille très fort. Ce n’est pas un problème en soi, mais si les joueurs sont à l’aise avec le fait d’avoir leur puck dans la palette, est-ce que ça va marcher si tu leur dis envoie le dans le coin et va le chercher, je ne suis pas sûr.
Moi mon style, c’est faire quelque chose qui va bien se marier avec les joueurs, ce qu’ils préfèrent faire, leur donner un peu de confiance en eux, les responsabiliser. Parce qu’en fait s’ils veulent garder la rondelle, pas de problème, c’est ta décision, mais faut pas la perdre.
C’est ce qu’il s’est passé contre Chamonix, ils ont marqué un très bon but, mais on a beaucoup cassé notre jeu sur les autres, et perdu la rondelle. Le hockey c’est basé sur la prise de décision, prendre conscience que tout peut avoir un impact sur le jeu, et donner de la confiance là-dedans ça va augmenter le jeu de l’équipe je pense.
Si l’équipe était faite pour « dump et chase », pas de problème, mais elle n’est pas faite pour ça.
Plan de Match : Jusqu’à maintenant, qu’as-tu pensé du championnat français ? Le suivais-tu depuis la Suisse et l’Allemagne ?
Je suivais pas du tout avant, ou très peu. J’essaye de rester concentré sur mon championnat, mais j’ai quand même toujours eu un intérêt car ma copine est à Paris. De plus, certains joueurs viennent de chez moi comme Will Bower ou Kelsey Tessier. J’ai un peu suivi mais je restais vraiment en surface car franchement, il n’y a pas beaucoup de systèmes de jeu qu’on aurait pu réutiliser.
Il y a trop d’inégalités, les clubs de bas de classement produiront toujours moins car ils ont moins d’argent. Je trouve ça dommage sportivement, car le pays gagnerait à rendre le niveau plus égal. Regarde en Suède, en Finlande, il y a plus de parité car il y a un salaire minimum, un salaire maximum, tous les clubs travaillent ensemble pour faire grandir la globalité.
Je trouve que la ligue pourrait être meilleure en améliorant certains points. Cela attirerait plus de joueurs, de fans, une parité rendrait tous les matches excitants, et la patinoire serait pleine à chaque match.
Regarde, tout le monde s’accorde sur le fait que Grenoble, Rouen ou Angers devrait gagner, mais est-ce qu’une victoire de Briançon serait envisageable ?
En NHL, Las Vegas a atteint les finales de Stanley Cup sur leur première année d’existence, ce serait compliqué ici pour une jeune équipe et ça c’est à cause des inégalités.
Plan de Match : Comment se sont passées ta signature et ton arrivée à Angers ? Comment-en êtes-vous venus à discuter de ton arrivée ici ? As-tu été bien accueilli ?
J’ai eu des offres, mais comme je te disais tout à l’heure, il faut qu’il y ait plein de paramètres réunis ensemble pour que j’ai envie d’y aller.
J’ai un ami au Canada qui m’a dit j’ai peut-être un job pour toi, avec une bonne équipe et des bonnes personnes. Mon dernier job par exemple, j’étais plein d’espoir, mais… La plus importante des choses ce n’est pas l’argent, c’est l’humain. Quand j’arrive ici j’ai un sourire sur ma face, que ce soit avec Alexis, Sim, les gars de l’équipe ou du bureau, tout est fun. On a échangé un ou deux jours, ensuite on m’a appelé le 21 décembre, et j’étais ici le 22.
Plan de Match : Quels sont tes objectifs avec l’équipe ?
Gagner. Gagner tous les championnats, mais c’est difficile, parce que même si l’équipe est bonne, il faut que tout soit synchronisé pour gagner. C’est difficile à comprendre pour tout le monde, pour les fans aussi, que même si ton équipe est très bonne sur le papier. Il faut que tout soit réuni à un certain instant pour que ça fonctionne.
Pourquoi est-ce que la France n’a pas gagné la coupe du monde cette année ? Ils avaient une bonne équipe, ils pouvaient gagner, ils devaient gagner, mais sur un match, un jour, tout peut se passer. Ça arrive, et ça fait la beauté du sport, que même si tu fais tout ce qu’il faut, et bien des fois ça ne marche pas.
On voit contre Mulhouse par exemple, beaucoup d’offensives mais ça ne voulait pas rentrer. Je peux dire aux joueurs, là tu dois être là, envoyer la rondelle ici, et toi tu la mets dans le but, mais je ne suis pas sur la glace pendant le match. Ça dépend des choses dans la tête à ce moment, ça dépend des joueurs adverses, du gardien. Et c’est comme ça dans tous les sports.
Les New York Yankees devraient gagner tous les ans, mais ils ne le font pas, pourquoi ? Les Los Angeles Lakers devraient gagner tous les ans, mais ils ne le font pas, pourquoi ? Pour moi c’est très clair, et j’aimerais que tout le monde comprenne, la beauté du sport réside dans cette adversité et le fait que même si tu payes le plus cher tes meilleurs gars, tu n’es pas forcé de gagner. C’est pour ça que j’aime les jeux olympiques, c’est le meilleur hockey du monde. C’est juste les meilleurs joueurs contre les meilleurs joueurs, sans argent derrière tout ça, tout est à propos de gagner.
Avec Angers c’est pareil, je veux tout gagner, mais ce n’est pas parce que je le veux qu’on va y arriver. Mais c’est ça l’objectif, gagner les trois coupes.
Plan de Match : Selon toi quelles sont les faiblesses de ton équipe, penses-tu possible d’améliorer ça ?
Facile, contrôle de la rondelle et discipline. On a trop de pénalités, on perd trop la rondelle, et on essaye de travailler là-dessus, mais ça viendra qu’avec l’entraînement.
Il faut toujours pousser plus loin pour avoir des résultats, il faut arriver à une constance de jeu. Les meilleures équipes du monde elles se font avec le travail et la constance, quel que soit le sport. Ils vont s’approcher petit à petit du championnat tous les ans, et ensuite ils vont le gagner, et être dans les meilleurs. Et la constance vient aussi des gens. En Suisse, Langnau change de staff tous les ans, des fois même plusieurs fois dans l’année, et après se demandent pourquoi ils n’y arrivent pas. Les joueurs ont cette phrase « Je marquais mon gars coach, ce n’est pas ma faute », c’est faux, on a tous notre part.
Plan de Match : Beaucoup critiqué, que penses-tu de l’arbitrage en France ?
L’arbitrage en France est très inconstant, mais ça pourrait s’améliorer en y mettant plus de moyens financiers, et d’autres choses. Par exemple, améliorer la communication avec les arbitres est très importante. Moi j’aimais bien parler avec les arbitres pendant la saison, avant et après les matches, ça aide à comprendre, à faire des retours, mais beaucoup d’entraîneurs n’aiment pas ça.
Tu peux voir pendant les matches encore aujourd’hui, je descends beaucoup leur parler. Ce n’est pas pour gueuler ou pour du négatif, c’est pour communiquer, c’est aussi du respect. C’est important aussi qu’ils se rendent compte qu’on n’est pas tous des « trous du cul ». Arbitres, joueurs, entraîneurs, fans, on est tous un petit morceau du jeu.
Plan de Match : Comment organises-tu tes entraînements, as-tu un entraînement type ?
Je n’ai pas d’entraînement type. Déjà les joueurs ont besoin d’une routine, et je ne veux pas bousculer celle qu’ils ont en place, alors je laisse l’organisation à Alexis. Ça commence par de l’échauffement, ensuite des mouvements d’ensemble sur la glace, puis de l’intensité, enfin la tactique. Aujourd’hui ça va être un peu différent car on a travaillé très fort hier, mais c’est compliqué de prendre les rênes de l’équipe en cours de saison. C’était que notre troisième entraînement hier, mais on adapte aussi à la journée, à ce qui a été fait la veille hier, aux matches, aux voyages, car on voyage souvent en France.
Plan de Match : Que penses-tu des joueurs pouvant évoluer à plusieurs postes ? On a pu voir Nicolas Ritz évoluer en défense en début de saison, ce système peut-il avoir sa place sous ta direction ?
Je pense que marquer des buts est difficile car c’est basé en grande partie sur la confiance. Mais les joueurs qui ont une bonne compréhension du jeu, c’est hyper important. Je pense par exemple qu’un grand défenseur offensif ça n’existe pas, c’est juste un très bon défenseur.
Cale Makar, Victor Hedman, c’est des gars qui peuvent un peu jouer partout, c’est des gars rares, mais si c’est possible, j’aimerais avoir des joueurs comme ça, et oui j’aimerais l’utiliser.
Après, les défenseurs et les centres sont des rôles pas si différents. J’aime bien dire ça même si ça fait rire les gars, mais les défenseurs et les centres doivent être les joueurs les plus intelligents, avec la plus grande vision de jeu. Les ailiers peuvent tricher, je n’aime pas ça, mais ils peuvent.
Le centre doit bouger partout, en défense, en attaque, alors un très bon centre peut jouer partout, mais combien de joueurs peuvent vraiment jouer comme ça à ce niveau ? Est-ce qu’on a l’argent pour les recruter ? Je ne sais pas.
Plan de Match : On a pu remarquer que tu essayais différents mélanges sur tes lignes, quelle est ta philosophie à ce sujet ? Changer les lignes en cours de match en fait-il partie ?
J’essaye d’avoir des lignes fixes, je suis plus à l’aise avec ça, mais faut aussi savoir s’adapter, car quand on a trop de punitions, c’est plus difficile de garder le rythme. Ça m’ennuie car ça fait perdre du temps de glace, Couturier par exemple a bien joué, mais on était beaucoup en infériorité, en unité spéciale, et on devait garder le rythme, donc il a perdu du temps de jeu.
Ne pas le faire jouer c’est le passé, il faut trouver une façon de mettre les jeunes sur la glace un peu plus souvent. Ce n’est pas un droit de jouer ici, c’est un privilège.
Ce n’est pas une ligne pour améliorer ton CV, ça se mérite. Baptiste a mérité sur le dernier match. Je lui parle, je lui dis ce qu’il doit améliorer, et il travaille fort.
Plan de Match : Penses-tu avoir trouvé ce qui fonctionne le mieux ?
Non, en dehors de la première ligne, il faut donner un peu de temps pour trouver de la chimie, pour permettre aux autres joueurs de bien s’y mettre et de marquer, mais ça va venir avec le nouveau jeu.
En fait toutes nos lignes ont un peu la même identité, ça manque juste d’alchimie, mais ça va se faire. La ligne Torquato, Gints et Harms est sur la bonne voie pour y arriver.
Plan de Match : Comment prépares-tu tes joueurs mentalement, à un match a pression comme cette demi-finale contre Grenoble, ou la Continental Cup ?
Je leur dis que c’est une grande opportunité, mais il ne faut pas ajouter de pression pour tel ou tel match, pour telle ou telle équipe. Si tu changes ça, tu changes l’approche, et les joueurs ne seront jamais concentrés de la même manière. Pourquoi est-ce que Rouen a perdu contre Anglet ? Trois points c’est trois points, que ce soit contre Anglet, Cergy, ou Grenoble, et les joueurs devraient être concentrés de la même manière. Le match de coupe de France contre Grenoble est plus excitant pour les fans, les présidents, c’est une bonne opportunité, mais ce n’est pas si différent de la Continental Cup, ou d’un match de saison. Dans tous les cas, il faut gagner.
Plan de Match : Est-ce qu’avoir coaché Brent Aubin et Bobby Raymond, tous deux évoluant à Grenoble, peut t’aider à contrer les Brûleurs de Loup ?
Non, c’est cool de les voir, de les affronter, mais deux joueurs ne font pas une équipe.
Plan de Match : As-tu un mot de la fin à partager ?
J’aimerais juste ajouter que gagner ce n’est pas juste l’équipe sur la glace, avoir du soutien des partisans, de tout le monde, ça aide. Il ne faut pas oublier que les joueurs sont avant tout des humains, et les attaquer, que ce soit sur les réseaux ou ailleurs, c’est brutal. Les défaites ça arrive, mais est-ce que ça veut dire qu’on est tous des merdes ? Non. C’est si facile d’être haineux aujourd’hui, mais si demain cela m’arrive, mes enfants qui suivent l’équipe le verront, et ça aura un impact sur eux plus que sur moi. Les joueurs sont sur la glace à chaque match. Ils ne se cachent pas.
Au-delà de ça, juste que je suis très heureux d’être là, j’aime la ville, les fans sont supers, la patinoire est incroyable. Continuez de nous soutenir, ça pousse vraiment les joueurs à gagner.