Il a porté pendant près de 15 ans le maillot bleu, pilier défensif de l’équipe de France. Kévin Hecquefeuille a décidé de mettre fin à sa carrière. Il commence une nouvelle carrière, celle de coach pour les Scorpions de Mulhouse. Il s’est confié sur ses premiers pas comme coach.

Plan de Match : Comment vis-tu tes premiers pas comme coach pour les Scorpions ?

Kévin Hecquefeuille : C’est pour moi les premiers pas dans un nouveau métier que je découvre. Il s’agit de mon premier recrutement. C’est la première fois que je construis une équipe. Dès la fin de saison, nous nous sommes projetés sur ce que nous voulions faire pour la saison 2022-2023 avec Erwan Agostini. Il s’occupe de la structure, et moi du sportif. Ce n’est pas simple mais je prend mes marques petit à petit.

PDM : Beaucoup de mouvements à Mulhouse, comment construis- tu ton équipe ?

K.H : En premier lieu, nous n’avons gardé aucun étranger. Ce n’était pas forcément le plan initial mais cela n’a pas été simple. Notre philosophie est de construire sur le long terme. Cela passe par la formation des jeunes. Jusqu’à maintenant, nous avons fait un boulot plutôt intéressant. Pour construire une équipe, nous analysons les besoins que nous avons. Nous devons prendre en compte les contraintes budgétaires du club. Après avoir fait le bilan de la saison passée, nous avons décidé de ne pas augmenter la masse salariale. Nous allons regarder pour tenter de la baisser, si c’est possible.

La méthode est la même pour tous les coachs, je pense. En ce qui me concerne, je contacte les agents et mes connexions personnelles. Je passe au peigne fin, tous les joueurs que l’on me propose. Je regarde énormément de vidéos, notamment grâce à Instat qui séquence tous les matchs des joueurs. Par ailleurs, je donne mes contraintes en amont aux agents : je ne peux pas me permettre de prendre des joueurs mariés avec des enfants. Le salaire annuel est compris entre 15 et 20 000€. Dès que j’ai un joueur intéressant, j’appelle les coachs et m’informe sur le joueur. Un point qui m’intéresse particulièrement c’est l’ambition du joueur. Comment est-ce qu’il se projette dans un projet ? Qu’est-ce qu’il souhaite faire ?

Plan de Match : Comment expliques-tu tous les départs des étrangers ?

K.H : Beaucoup de ces joueurs ont décidé d’arrêter leur carrière, pour les autres nous n’avions pas le budget. Pour certains, c’est le timing qui n’était pas bon. A titre d’exemple, je souhaitais garder Shawn Boutin, au moment des négociations je n’avais pas l’enveloppe suffisante. Quelques semaines après, je le recontacte mais il n’étais plus disponible.

Plan de Match : Quel est ton budget pour recruter ?

K.H : A vrai dire je ne le connais pas au global, je sais combien je peux dépenser par mois en masse salariale. Il faudrait voir avec Erwan pour avoir une vision globale. Erwan fait un travail en profondeur pour comprendre les forces et les faiblesses de l’organisation des Scorpions de Mulhouse. Il travaille sur la structuration du club.

Plan de Match : Toutes les informations qui nous remontent semblent indiquer un marché compliqué cette année. Ressens-tu la même chose ?

K.H : Oui très clairement. C’est mon premier recrutement et c’est compliqué (rires). J’ai l’impression que nous avons de gros concurrents sur le marché des transferts. Le hockey français n’a pas de pouvoir économique et ne peut pas lutter avec certaines ligues comme la Roumanie, la Pologne ou la Hongrie par exemple. C’est une vraie problématique. [NDLR: Sebastien Oprandi nous l’évoquait également]

Plan de Match : De façon étonnante, dans le contexte actuel, beaucoup de joueurs recrutés sont russes. Pourquoi selon toi ?

K.H :  simple, les Russes sont bons et pas chers. Ainsi, Andrei Rychagov est clairement un joueur qui colle à notre philosophie et notre besoin. C’est un passionné de hockey avec de l’expérience.

Plan de Match : Tu débutes dans le métier, est-ce qu’il y a des coachs que tu regardes plus que d’autres ?

K.H : A Mulhouse, nous souhaitons mettre en place une philosophie de jeu basée sur la vitesse. Nous regardons le patinage. Mon objectif est de construire une équipe agressive dans le bon sens du terme. Pour répondre à la question je trouve que ce que fait Jonathan Paredes à Cergy-Pontoise ou Eric Blais à Gap correspond à ce que je souhaite mettre en place oui.

Après, je suis ouvert à toutes les discussions pour mieux appréhender le métier de coach. J’ai eu l’occasion d’échanger longuement avec Newell Brown (NDLR : assistant coach des Ducks d’Anaheim depuis la saison dernière). C’est toujours intéressant d’avoir la vision de coachs NHL ou AHL. Il faut toujours être ouvert à ce qui se fait dans le hockey moderne.

Plan de Match : Justement, sur Plan de Match nous mettons en avant les statistiques avancées, quel est ton point de vue à ce sujet ?

K.H : J’aimerai vraiment y consacrer du temps. J’aimerai mieux comprendre les implications. Je sais que certains coachs de Magnus les utilisent, mais pour moi c’est compliqué. Je sais aussi qu’en France nous sommes plutôt en retard sur ce sujet. Ce n’est pas la priorité du hockey français malheureusement. Il faut structurer d’abord. Après sur les ‘stats’, il y a des choses à prendre et des choses à laisser. L’humain ce n’est pas quelque chose qui peut être parfaitement modélisé.

Plan de Match : Quel sera l’objectif pour les Scorpions de Mulhouse pour la saison 2022-2023 ? Peux-tu nous en dire plus sur l’effectif ?

K.H : L’objectif évoluera au cours de la saison, oui on veut jouer le maintien mais ça pourrait évoluer. Tout dépend comment la saison débute. Je ne suis pas là pour vendre du rêve. Sur l’effectif, je suis content de voir revenir Quentin Papillon. On se connait, on a joué ensemble. Je l’avais poussé à partir en Norvège. Je pensais qu’il aurait eu plus d’opportunités. Il ne faut pas se faire d’illusion, les championnats de Norvège et du Danemark sont plus regardés que le nôtre.

Malheureusement, il n’a pas pu continuer son aventure à l’étranger. Comme je le disais le marché est très bizarre cette saison. Mais pour Quentin, ce n’est que partie remise pour lui. Il a des ambitions, il sait ce qu’il veut. Il rebondira à l’étranger dans une équipe meilleure et en étant mieux entouré.

Du côté des jeunes prometteurs, Philéas Perrenoud fera partie de l’équipe. Il a fait une excellente saison l’année dernière (NDLR : +500% par rapport à la projection de points de Magnus Corsi). Il doit encore travailler sur la partie physique mais il fait partie des plans probablement sur une troisième ligne.

Enfin, nous avons une défensive très jeune, nous recherchons un défenseur avec un peu plus d’expérience. Cela a un certain coût. On va voir ce qu’on est capable de faire. On va voir ce que le marché offre.