En deux ans dans la ligue collégiale du Québec, la RSEQ, elles ont pu engranger titres et expérience. De quoi décupler leur confiance et la partager au sein d’une équipe de France féminine dans laquelle elles ont conquis leur place. Au sortir de cette saison qui les a placés en tête du tableau statistique de la RSEQ, Jade Barbirati et Manon Le Scodan reviennent sur leur progression et partagent avec nous leurs ambitions pour les prochaines échéances de l’équipe de France.

Plan de match : Vous venez tout juste de terminer votre saison en championnat. Une nouvelle fois, vous avez été jusqu’à la finale du championnat collégial. Vous terminez en tête des classements statistiques, comment avez-vous vécu cela de l’intérieur ?

Jade Barbirati : Nous l’avons vraiment bien vécue…

Manon Le Scodan : Oui, notre équipe a passé une bonne saison et nous aussi. Très heureuses de nous retrouver en finale des Playoff.

JB : Sur ce point, c’était un peu compliqué. Nous avions un accord avec le staff de l’équipe de France qui nous permettait d’aller jusqu’au match 4 des Playoff, la préparation de l’équipe de France commençant en même temps que le troisième match.

Plan de Match : Finalement, il aura fallu 4 matchs aux Titans du Cégep Limoilou pour vaincre vos Islanders du Collège John Abbott. Cependant, vous sortez d’une saison au cours de laquelle vous avez dominé le championnat avec 70 points pour Manon et 57 points pour Jade. Cela doit être une petite fierté pour vous ?

MLS : C’est sûr, on ne va pas dire non même si cela n’était pas notre objectif de saison.

JB : Cela nous met tout de même en confiance pour la suite et pour le championnat du monde.

Plan de Match : Une deuxième année ici que vous avez partagé avec une troisième française qui a intégré l’équipe ?

MLS : Oui maintenant il y a Perrine Lavorel. On a réussi, je pense, à bien l’intégrer. Cela se passe super bien pour elle aussi. A trois mais également avec les autres canadiennes nous profitons de notre vie ici. Cela se passe super bien.

Notre objectif principal restera d’aller aux Jeux Olympiques avec l’équipe de France.

Plan de Match : Lors de notre dernière visite à Montréal, vous nous aviez parlé de deux objectifs que vous vous étiez donné : continuer à vous améliorer dans le jeu et dans la pratique de la langue anglaise. Vous considérez que vous en êtes où aujourd’hui sur ces deux points ?

JB : En termes de hockey nous avons bien progressé. Il nous reste tout de même des choses à travailler. Nous avons encore un an ici avant de partir à l’université. Nous allons pouvoir encore travailler beaucoup de choses.

Et au niveau de la langue nous avons également beaucoup progressé. Nous ne sommes pas encore totalement bilingues à 100% mais nous nous débrouillons et à l’école, les notes suivent.

Plan de Match : En parlant de la suite, vous vous projetez déjà sur l’après Cegep ?

JB : Oui nous avons déjà eu des contacts avec des universités. Notamment à l’Université du Vermont pour ma part, là où joue déjà Julia Mesplède.

MLS : Et pout ma part, l’université de Clarkson.

Plan de Match : Deux universités américaines, peut-être une belle étape vers la PWHL, c’est pour vous deux, objectif lointain ?

JB : C’est une grande avancée pour le hockey féminin. Il y a aujourd’hui 6 équipes mais cela va continuer à se développer avec l’arrivée de nouvelles d’équipes, pour devenir quelque chose d’énorme.

MLS : C’est sûr, ça nous fait rêver si on nous le proposait, on ne peut qu’accepter. C’est tout de même le plus haut niveau du hockey féminin. Cependant je ne pense pas que ça soit dans nos objectifs principaux. On verra après l’université où on en est dans le hockey, dans nos études et dans notre vie.

JB : Si cette opportunité nous est proposée, nous ne dirions pas non en effet. Mais si ce n’est pas possible nous ne serions pas déçues. Notre objectif principal restera d’aller aux Jeux Olympiques avec l’équipe de France.

MLS : Avant cela, il faudra gagner le championnat du monde en D1A et remonter en élite.

JB : Puis en février, lors du TQO, battre toutes les équipes et réussir à aller à Milan.

Plan de Match : Et dans le cadre de votre développement de joueuses, quels sont pour vous les éléments que vous pensez encore pouvoir améliorer ?

MLS : Pour ma part, j’aimerai développer ma vitesse parce que les joueuses internationales sont quand même beaucoup plus rapides que dans le championnat collégial. Ainsi que mon jeu physique, un point important au niveau international

JB : Je vais dire la même chose. La vitesse, c’est ce qui va jouer le plus ? En tant que joueuse, si tu es rapide et complète au niveau des autres habilités, c’est gagné : Tu te rends plus vite à la cage, tu récupères plus vite les palets libres… Le jeu physique et la rapidité sont essentiels.

Plan de Match : Ce sont deux éléments du jeu canadien que vous vous efforcez d’intégrer à votre jeu ?

JB : Oui, plus utiliser sa vitesse et moins ses mains. Ici, le jeu est vraiment plus physique. Il faut souvent lever la tête si tu ne veux pas avoir une commotion à chaque situation jeu*.

MLS : Nous avons pour consigne dans l’équipe de jouer physique. Les autres équipes de la ligue jouent beaucoup moins physique que nous.

JB : Cela se constate même dans nos entrainements, très physiques, avec des mises en situations durant lesquels la joueuse défensive peut se retrouver sans cross et doit tout de même mettre en échec la joueuse offensive. Les commentateurs de nos matchs le disent, notre jeu physique crée la différence et les joueuses adverses n’arrivent pas à combler cette différence.

MLS : Ce sont des choses très importantes également à l’international. C’est ce qui nous est demandé en équipe de France. Pour le Mondial il va falloir que toutes, en équipe, on arrive à mettre en place ces points importants. C’est ainsi qu’on arrivera à atteindre nos objectifs.

Plan de Match : Vous avez évoqué les deux prochains gros objectifs en équipe de France, ce sont les mondiaux D1A et le TQO. Ils sont liés au ranking. Comment envisagez-vous concrètement ces échéances ?

JB : Nous ne sommes plus du tout la même équipe qu’à Brampton. Nous étions une équipe toute nouvelle. Nous n’avions pas beaucoup joué ensemble. Nous étions encore un peu jeunes dans le jeu face à des équipes plus solides, plus organisées et avec des styles de jeu que nous n’avions jamais rencontré auparavant. Nous les jeunes, nous ne voulions pas forcément prendre d’initiatives. Maintenant, je pense qu’on a réussi à créer un groupe où on est beaucoup plus solides. Chacune participe à ses tâches. Cela ne peut aller que mieux durant ce mondial D1A.

MLS : Nous avions très peu d’expérience en Mondial à Brampton. Aujourd’hui, nous avons l’expérience du Mondial élite qui est d’un autre niveau. Cela ne peut être que positif pour le Mondial de cette année. Cette saison nous avons bien travaillé pour remonter et retrouver l’élite.

Plan de Match : Vous arrivez au mondial avec une équipe toujours jeune mais avec plus de vécu et d’expérience en commun ?

JB : Nous deux, nous sommes arrivées lors du Mondial à Angers. Nous avions donc déjà commencé à nous intégrer dans le groupe. C’est certain, lorsque les anciennes sont parties, nous avons eu une place tout de suite un peu plus importante. Lors du Mondial à Brampton, nous nous sommes retrouvées avec plus de jeunes joueuses que de joueuses expérimentées. Pour les autres jeunes, elles ont bien été intégrées. Ce sont toutes nos copines, des filles de notre génération (NDLR : même génération au pôle France). Il a été plus difficile sans doute de créer des liens entre elles et les plus anciennes qu’elles ne connaissaient pas. Maintenant cette étape est passée, tout le monde a créé des liens. On se connait mieux.

Plan de Match : En vue de ces deux échéances, quels sont les mots que vous pourriez utiliser pour définir les forces et faiblesses de l’équipe de France Féminine ?

JB : Ce sont toujours un peu les mêmes mots qui reviennent : Nous sommes toutes fières d’être dans ce groupe, de porter le maillot et travailler fort. Donc je dirais d’abord fierté.

MLS : Nous sommes aussi une équipe qui respecte vraiment le plan de match et les consignes des coachs. C’est également un de nos points forts.

JB : Lorsque l’on suit le plan de match, que nous sommes agressives et focus sur le jeu, nous avons plus de facilité à tenir les équipes en face. Dès que nous commençons à stresser, à sortir un peu du plan de match, que l’on fait un peu ce qu’on veut, alors nous perdons facilement nos objectifs de vue et du coup on perd le match.

Plan de Match : Avec de belles saisons en club, plusieurs joueuses, dont vous, arrivent au mondial avec le plein de confiance ?

JB : Ce qui est produit en club en vraiment en lien avec ce qui est produit en équipe de France. Si nous sommes performantes dans nos clubs, il n’y a pas de raison de ne pas l’être avec l’équipe de France, c’est dans la continuité des choses.

Plan de Match : Au quotidien, vous êtes pourtant loin de la France. En dehors des stages, vous gardez tout de même des liens réguliers avec le staff de l’équipe ?

JB : Nous avons un bon suivi. Nous sommes souvent en contact avec Gregory. Surtout avant le Mondial nous l’avons eu 4 à 5 fois par téléphone pour nous demander comment ça allait. Il nous a également demandé si nous avions besoin de retour vidéo parce qu’il regarde souvent nos matchs.

Plan de Match : Vous disposez également, il me semble, d’un suivi physique et médical ?

JB : Nous avons un groupe WhatsApp dans lequel, selon les besoins, nous pouvons interagir avec le staff. L’équipe médicale est, elle, disponible en privé. Et le préparateur physique nous envoie des messages sur le groupe relatif à la préparation ou du suivi sur l’application athlète 360.

En saison, nous la remplissons un peu moins, mais à l’approche des mondiaux, ils nous demandent de remplir les données de façon plus assidue 2 à 3 semaines avant le regroupement pour constituer le suivi. Nous répondons à des questions concernant notre sommeil, nos douleurs éventuellement, sur nos entraînements … ce qui leur permet d’avoir un bilan de nos précédentes semaines.

MLS : Puis pendant le stage nous sommes censées le remplir le matin et l’après-midi, après les pratiques. Cela permet au staff d’évaluer le niveau de fatigue de l’équipe ou l’ambiance de l’équipe parce qu’il y a certaines questions sur ce sujet. Ainsi ils ajustent les pratiques selon l’état du moment au sein de l’équipe.

Plan de Match : C’est pour le staff et pour vous un outil utile, surtout avec une préparation très courte avant le mondial. Comment l’appréhendez vous ?

JB : Nous savons déjà qui nous allons rencontrer. Ce sont des équipes que l’on connaît. On les a déjà rencontrés assez souvent en tournoi des quatre nations. Face à la Hongrie cela a toujours été une grosse bataille. Cependant ce championnat du mondial va être honnêtement assez serré. Tout le monde peut battre tout le monde.

MLS : Pour passer, il faudra vraiment aller chercher les points là où nous pourrons aller les chercher.