Depuis une dizaine d’année, le hockey Hongrois se développe à vitesse grand V. L’équipe masculine a battu la France à Tampere en 2023, tout comme l’équipe féminine à Brampton. Les hommes sont descendus mais pas les filles. Comment et pourquoi le hockey hongrois s’est développé aussi rapidement ? Plan de Match a enquêté.
Un financement unique, le TAO
Le principe du TAO (Tarsasagi Ado és Osztalekado), a été introduit par le Premier ministre Viktor Orbán. Il consiste à concentrer et redistribuer les bénéfices des entreprises privées de taille moyenne et grande au développement de la santé, de l’éducation et du sport. En ce qui concerne le hockey, chaque joueur reçoit une contribution pouvant aller jusqu’à un million de forints par an, soit environ 2 800 euros. Les entraîneurs sont également rémunérés à partir de ce forfait indicatif, et des contributions sont versées pour les frais de déplacement des joueurs, leur hébergement, la construction de gymnases et l’entretien des gymnases.
Pour qu’un club bénéficie du système de financement il doit être présent dans toutes les catégories d’âge pendant un certain temps. Le gouvernement hongrois choisit des sports références, le hockey est l’un des cinq sports les plus populaires et donc les plus soutenus, aux côtés du football, du handball, du canoë-kayak en eaux vives et du water-polo.
Depuis l’introduction des subventions TAO, le nombre de patinoires en Hongrie a plus que doublé. Six nouveaux comtés et dix nouvelles villes ont inauguré des patinoires, contribuant ainsi à promouvoir le sport et à accroître la base de joueurs à l’échelle nationale. C’est une approche unique et innovante du financement sportif. Contrairement à de nombreux pays où le soutien gouvernemental joue un rôle prépondérant, la Hongrie s’appuie sur un système créatif qui implique des entreprises et des fonds privés, en faisant un véritable partenariat entre le sport et le secteur privé.
Le TAO pour la Fédération hongroise de hockey sur glace
La Fédération hongroise de hockey sur glace fonctionne avec un cadre financier qui permet aux clubs et aux fédérations de recevoir des fonds des entreprises. Ces entreprises peuvent réorienter une partie de leur impôt sur les bénéfices dans le sport. Cependant, chaque club et fédération doit convaincre indépendamment ces entreprises de s’associer à eux. Le gouvernement gère le système mais ne transfère pas directement de fonds. Il délivre des autorisations et des limites, veillant à ce que le processus respecte les réglementations approuvées par l’UE.
L’un des aspects clés de ce modèle de financement unique est qu’il ne s’agit pas d’un transfert d’argent du gouvernement vers les clubs ou la fédération. Au lieu de cela, il fonctionne comme une option qui permet aux organisations de collecter des fonds de manière spéciale. Les clubs et les fédérations contractent avec des donateurs, souvent plusieurs dizaines. Ces donateurs choisissent d’allouer une partie de leur impôt sur les bénéfices à la promotion du hockey sur glace hongrois.
Ce mode de fonctionnement a permis au hockey sur glace hongrois de réaliser d’importants progrès. Le nombre de joueurs passant de moins de 2 000 à plus de 11 000. Le système soutient non seulement le développement des joueurs, mais aussi le développement des infrastructures, telles que la construction de nouvelles patinoires et des mises à niveau écoénergétiques.
L’allocation financière est basée sur un système sophistiqué qui prend en compte divers facteurs, notamment la taille et la qualité du club, les conditions infrastructurelles, etc. Cela garantit une répartition efficace pour favoriser la croissance du sport. Le financement n’est pas fléché en fonction du sexe, que ce soit pour les hommes ou les femmes, et aucune caractéristique de genre similaire n’est prise en compte dans aucun des facteurs d’allocation, que ce soit au niveau du club ou de la fédération.
Ces fonds proviennent de sponsors locaux et internationaux. Alors que les fonds gouvernementaux sont principalement utilisés pour les dépenses telles que la location de glace, le transport, l’équipement et les salaires des entraîneurs, les fonds privés couvrent souvent les salaires des joueurs et les coûts des compétitions, assurant ainsi la pérennité du sport.
Une manne financière qui permet le développement d’académies de hockey
Le montant annuel de cette ressource financière est plafonné à 11,7 milliards de HUF (environ 30 millions d’euros, en fonction du taux de change). Ce financement alimente à la fois la fédération et les clubs et est principalement dépensé pour la location de glace, les frais de transport, l’équipement, les dépenses liées aux compétitions ou les salaires des entraîneurs. Environ 30 % du montant total est alloué au développement des infrastructures, notamment la construction de nouvelles patinoires, la rénovation des patinoires existantes, l’agrandissement des vestiaires, et récemment des initiatives liées à l’efficacité énergétique, comme les systèmes photovoltaïques.
Grâce à cette manne, la Fédération hongroise de hockey sur glace a réussi à mettre en place un système d’académies pour les jeunes joueurs âgés de 15 à 21 ans. Ces 4 académies nationales sont financées directement par le gouvernement et offrent un parcours structuré pour le développement des joueurs. Le montant alloué est de 4 milliards de Florint soit environ 11 millions d’euros.
En résumé, le modèle de financement du hockey sur glace hongrois est un exemple remarquable de collaboration entre le sport et le secteur privé. Il met l’accent sur la persuasion des entreprises à investir dans le sport grâce à des incitations fiscales, plutôt que de dépendre uniquement du financement gouvernemental. Cette approche a conduit à une croissance significative du sport et au développement d’infrastructures de classe mondiale, positionnant la Hongrie comme une étoile montante du hockey sur glace européen.
La croissance rapide et contrôlée du hockey sur glace en Hongrie
En 12 ans environ, le hockey sur glace en Hongrie a connu une croissance significative à la fois en termes du nombre de joueurs et du nombre de patinoires opérationnelles toute l’année. Actuellement, le pays compte 36 patinoires qui peuvent être utilisées en continu, bien que toutes ne fonctionnent pas à plein régime pendant les 12 mois de l’année en raison des coûts élevés de l’électricité.
Cette expansion rapide du sport en Hongrie témoigne d’une approche stratégique et bien contrôlée de son développement. La multiplication des installations de glace a permis d’offrir davantage d’opportunités aux joueurs et aux amateurs de hockey sur glace, contribuant ainsi à l’essor du sport dans le pays.
La plus grande patinoire d’Europe est située en Hongrie
Pendant plus de deux décennies, la Lanxess Arena à Cologne, en Allemagne (18 500 places), a été l’un des fleurons européens. Depuis le 16 décembre 2021, ce n’est plus le cas. En effet, ce jour-là, le spectaculaire MVM Dome a été inauguré à Budapest.
« Le championnat d’Europe de handball s’est récemment terminé dans cette salle. Il s’agit d’une arène multifonctionnelle pouvant également être utilisée pour le hockey, le volley-ball, le basketball ou le tennis. Une transformation interne est toujours nécessaire pour répondre aux besoins d’un sport particulier, ce qui nécessite des investissements dans l’infrastructure. En mode hockey, l’infrastructure a une capacité de 19 000 places. Depuis février 2022, Sportfive Hungary exploite la salle pendant une décennie. Ils souhaitent que le plus grand nombre d’événements possibles, couvrant de nombreux sports, aient lieu dans la salle », explique Ádám Fodor, directeur de la communication de l’Association hongroise de hockey.
En 2022, la salle a accueilli le Championnat d’Europe masculin de handball, en 2024, elle accueillera le Championnat d’Europe féminin de handball 2024, et en 2027, le Championnat du monde féminin de handball.
Quand y aura-t-il un grand tournoi de hockey ?
« Tout est ouvert et on ne sait jamais quand viendra le moment opportun. Nous sommes actuellement en division 1A (le deuxième groupe le plus élevé du CM) et nous disposons d’une autre salle de hockey relativement récente à Budapest – la Budapest Sports Arena László Papp (construite en 2003). Son seul inconvénient est sa capacité, car elle peut accueillir un peu plus de 8 000 personnes à l’intérieur », poursuit Ádám Fodor.
En décembre 2023, une nouvelle salle de sport et d’événements d’une capacité de 6 000 places pour le hockey sera construite à Székesfehérvár pour 92 millions d’euros. Tout comme le MVM Dome, l’Alba Arena est entièrement financée par l’État.
Le hockey hongrois se développe grâce à un soutien politique fort. Le système mis en place a permet une vraie progression sur les dix dernières années. Le revers de la médaille c’est que le sponsoring a disparu dans le hockey. L’avenir nous dira si c’est la bonne formule pour le hockey en Hongrie. En attendant les équipes de France U20 et sénior féminines passeront leur semaine à Budapest.