[ap_dropcaps style=”ap-normal”]A[/ap_dropcaps]lors que la pandémie a brusquement arrêté tous les championnats à travers l’Europe, la ligue Magnus s’est arrêtée juste avant les demi-finale. Cet arrêt brutal a eu un impact sur la situation économique de certains clubs. Au-delà du présent, Plan de match a voulu se projeter dans l’avenir. Nous vous proposons dans cette série une analyse des budgets, le point de vue d’un club et d’agents de joueurs. Premier volet de notre série, l’analyse budgétaire et les impacts.

Le premier impact pour les équipes de la ligue Magnus sera budgétaire, afin d’avoir une vue précise de la situation, nous avons voulu vous présenter la structuration des budgets des clubs de Magnus. En effet, selon le média Ecofoot, la ligue Magnus serait le championnat le plus impacté par la pandémie. Les revenus de la ligue Magnus proviennent de la billetterie.

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Selon surlatouche.fr, la billetterie représente en moyenne 26% des revenus des pensionnaires de la ligue Magnus. Selon nos informations, il s’agit ici des revenus dit grand public et non pas de l’ensemble de la billetterie. Nous avons demandé à plusieurs clubs de la ligue Magnus de nous donner dans les grandes lignes la structure de leur budget.

Des recettes principalement issues des sponsors et de la billetterie.

Côté recette la billetterie grand public et la billetterie VIP représentent près de 50% des revenus en moyenne. Selon nos informations la billetterie grand public représente 1,4 millions d’euros pour Grenoble, alors que cela ne représente que 350 000 € pour les Ducs d’Angers. Les subventions publiques elles représentent près de 20% en moyenne des recettes des clubs. Les recettes de la Magnus proviennent à 80% en moyenne de fonds privés. La première conclusion que nous pouvons faire est que le modèle économique est différent d’un club à un autre. Cependant le top-4, à l’exception notable d’Angers, tire principalement ses revenus du privé.

Répartition moyenne des budgets en Magnus

Néanmoins 20% des recettes, en moyenne, proviennent des collectivités publiques. Ces subventions représentent entre 10 et plus de 30% du budget du club. Selon les informations les écarts le club qui obtient la plus grosse subvention est Angers avec près de 650 000 € soit 28,26% de son budget total. C’est un élément non négligeable pour un top-4 de Magnus. A titre d’exemple Amiens ne perçoit “que” 450 000 € et ce sur différentes formes à la fois une subvention sèche et l’achat de places de saisons de la part des collectivités partenaires.

Globalement le budget moyen de la ligue est de l’ordre de 1,9 millions d’euros pour une subvention publique de 329 000 €, soit 18,56%.

Encore une fois cette approche nous démontre que les collectivités locales soutiennent leurs clubs locaux mais peut-être pas autant que nous pourrions l’imaginer. Le cas d’Angers est très particulier et est lié à l’accord entre la ville, l’agglomération et le club qui a permis d’avoir l’IceParc. Il s’agit d’en faire une place forte du hockey et d’attirer le plus de monde possible en pratiquant une politique tarifaire très basse comblé par les subventions et utiliser le budget pour avoir une équipe très compétitive. Vu sous cet angle, les arrivées de Giroux et Halley ne sont pas surprenantes.

Récapitulatif des subventions des collectivités par club / Poids dans le budget total

Les dépenses : principalement les salaires des joueurs et le staff sportif.

La structure des dépenses est sans grosse surprise, à savoir que la masse salariale est la ligne la plus importante du budget. Son poids varie entre 50 et 60% du budget, comme le dit Jacques Reboh “on construit une équipe en fonction du budget, il ne faut pas être mégalo” , et pas l’inverse c’est-à-dire construire un budget en fonction de l’équipe que l’on souhaite avoir. Ensuite vient la communication avec une part de 20% dans le budget. Le reste du budget est utilisé pour les déplacements, le matériel des joueurs mais aussi les prestations VIP ou la location de la patinoire. Cela représente en totalité environ 30% du budget soit 1,2 millions d’euros pour un club comme Grenoble. Un élément intéressant pour la suite, un match à Pôle Sud coûte au club entre 3 et 4 000 € par soirée. Si vous jouez à huis-clos c’est une perte sèche non négligeable lorsque l’on connait l’importance des recettes de billetterie.

Construire une équipe dépend du budget disponible à Gap par exemple les Rapaces peuvent compter sur 1000 abonnés par saison et 500 habitués par saison. Cela permet d’estimer un niveau de recette sur la saison mais le planning du championnat impacte fortement le niveau des audiences donc de la billetterie donc du budget.

Lorsque nous avons des matchs pendant les vacances scolaires et pendant la période des fêtes nous savons que nous avons une forte probabilité d’être à guichets fermés déclare Sébastien Oprandi, mais nous n’avons le planning des matchs qu’en juin, le recrutement démarre dès la fin de la saison en mars ou avril. Enfin les subventions dépendent de délibérations et sont souvent votées en début d’année civile pour l’année en cours. En 2020 avec les campagnes électorales puis le confinement beaucoup de collectivités ne se sont pas réunis pour voter les budgets donc les subventions aux équipes sportives. C’est une vraie interrogation pour l’ensemble des clubs.

Impact à court et moyen terme de cette pandémie

A court terme les clubs les plus exposés ont été ceux du top-4 qui avaient pour la plupart construit un budget en se projetant sur des demi-finales voir une finale de ligue Magnus. Les clubs commencent à gagner de l’argent à partir des playoffs. Ce sont les matchs les plus rémunérateurs et ce dans un court laps de temps. Cette saison avec la fin prématurée de la saison, les pertes pour les clubs sont estimées à 3,3% du budget total des clubs.

A moyen terme l’impact se fera sentir sur le recrutement, comme nous l’ont confié plusieurs agents de joueurs les budgets devraient être impactés partout en Europe de l’ordre de 20 à 30%. Par ailleurs la pandémie actuelle limite les déplacements entre les grandes régions du monde. Beaucoup de clubs Magnus dénichaient de jeunes joueurs plus ou moins talentueux en Amérique du Nord. La donne est différente aujourd’hui, avec les frontières fermées il n’est peut-être pas opportun de faire signer un nord-américain aujourd’hui… Même si il pourrait y avoir de belles opportunités à saisir. Nick Riopel un ancien pensionnaire de Magnus, aujourd’hui agent de joueur s’en faisait l’écho à Radio-Canada il y a quelques semaine (à lire ici). D’ailleurs il ne serait pas étonnant de voir des équipes très franco-française l’année prochaine ou à tous les mois très Européenne. Rouen a déjà indiqué que son recrutement serait tourné vers les joueurs français et plutôt jeunes ; Grenoble verra son effectif quasi inchangé la saison prochaine.

En prenant en compte tous les éléments à date, nous avons tenter de nous projeter avec une baisse des budgets de l’ordre de 20 à 30% et voici ce que cela donnerait :

Projection des budgets selon l’impact estimé de la pandémie.

L’impact budgétaire serait immédiat car comme nous l’avons vu les sponsors représentent près de 20% des recettes. Par ailleurs nous ne savons pas encore quand les rassemblements sportifs seront à nouveau possible. Pour rappel jouer à huis-clos n’est pas une option pour de nombreux clubs puisque chaque match représente un manque à gagner de plusieurs milliers d’euros selon le modèle économique en vigueur.

Aujourd’hui il reste une inconnue majeure concernant 20% du budget, il s’agit des aides des collectivités. En effet les dépenses étaient déjà contraintes, les ressources ne sont pas infinies et ce qui était donné hier au club de hockey local, ne sera-t-il pas allouer aux dépenses de solidarité pour faire face à la crise économique et sociale qui devrait être violente dès la fin du confinement ?

Des pistes pour assurer les revenus en cas de huis-clos ?

Les clubs sont conscients de ces problématiques, la fédération également tous discutent ensemble pour trouver une solution. La fédération a un budget limité mais serait prête à faire un geste pour les clubs afin que ceux-ci puissent survivre à la crise qui s’annonce. Selon nos informations la fédération devrait faire quelques annonces par l’intermédiaire d’Eric Ropert dans les prochaines semaines.

Nous avons détaillés la structuration des budgets de Magnus et nous remercions les équipes qui ont bien voulues jouer le jeu. Au cours de nos échanges une idée pour sortir par le haut de cette situation est revenue à intervalle régulier : et si les clubs avec l’aide de la ligue étaient en mesure de créer un revenu supplémentaire avec la mise en place de droits TV… L’idée est bonne notre point de vue mais elle doit s’accompagner d’une vraie stratégie conjointe entre les clubs et la ligue et ne passerait surement pas par Fanseat, affaire à suivre.